Voici l'avis de Pascal Boniface, Directeur de l'IRIS, Institut de Relations Internationales et Stratégiques :
Résultat de la mini-guerre qui a opposé la Russie à la Géorgie, Moscou vient de reconnaître l’indépendance de l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud.
Sur le terrain, cela ne change rien, les régions échappant depuis longtemps au contrôle de Tbilissi. Juridiquement, cette reconnaissance ne devrait pas être suivie par d’autres à l’exception de la Biélorussie et peut-être de quelques républiques d’Asie centrale. Pourtant, sans que l’on puisse parler de retour à la guerre froide, ces évènements ont une importance stratégique majeure.
La Russie est indubitablement le grand vainqueur de cet affrontement. Elle a mis en déroute les troupes géorgiennes. Elle va renforcer son contrôle sur les provinces sécessionnistes d'Ossétie du Sud et d'Abkhazie. Son armée s'est offert une victoire militaire bienvenue après trop d'humiliations (de l'Afghanistan à la Tchétchénie) contre la petite armée géorgienne. L'armée géorgienne était certes une proie facile, mais équipée par les Etats-Unis, ce qui renforce la satisfaction de Moscou.
La première leçon de ce conflit – et la plus évidente –, est le retour en force de la Russie sur la scène internationale. L’époque où, après l’implosion de l’Union Soviétique, Moscou était devenue une non-puissance, incapable de faire valoir son point de vue sur les grandes questions stratégiques, en proie au chaos sur le plan économique (le PNB russe a été divisé par deux entre 1991 et 2000) est bel et bien révolue. La Russie a été impuissante face aux élargissements successifs de l’OTAN, à la guerre du Kosovo, aux tentatives de recomposition géostratégiques du Proche-Orient, à l’implantation américaine en Asie centrale. Elle faisait le dos rond, en attendant des temps meilleurs. La signature d’un partenariat stratégique avec l’OTAN en 2002 a été considérée à tort comme l’acceptation d’une suprématie américaine. Poutine a, avec fermeté pour les uns et brutalité pour les autres, rétabli l’autorité de l’Etat en interne et le respect des intérêts nationaux sur le plan international. L’augmentation du prix des matières premières énergétiques, due en grande partie à la guerre d’Irak, a renfloué l’économie russe.
...
Voir aussi "La Russie ne veut plus être réduite au statut de vaincu de la Guerre froide"