LA VOIX DU NORD 08-12-09
Le Nord - Pas de Calais est particulièrement concerné par le rapport sur la radioactivité naturelle technologiquement renforcée remis à l'Autorité de sûreté nucléaire. L'association Robin des Bois y a recensé quinze dépôts de cendres, dont douze dans l'ex-bassin minier.
Le terril 99, à Harnes, est régulièrement montré du doigt. Par temps sec et venteux, d'épais nuages de poussières se dispersent sur Courrières et Carvin. La situation s'est améliorée après plusieurs plaintes contre Surschiste, qui exploite les cendres. Elles sont désormais humidifiées pour limiter les envols. Le « terril à suie » n'a pourtant pas fini de faire parler de lui. Le 99 est en effet cité dans le rapport de Robin des Bois sur la radioactivité naturelle technologiquement renforcée. Il est constitué de quelque 500 000 tonnes de cendres de charbon provenant des centrales thermiques voisines, aujourd'hui fermées. Or, la radioactivité est dix fois plus concentrée dans les cendres que dans le charbon.
Aux abords du terril, Maurice Lorthios, 75 ans, se montre fataliste. « Pendant longtemps, l'essentiel, c'était de travailler. On récolte les erreurs de nos parents et nos enfants récolteront les nôtres. » Il consomme des légumes cultivés sur place mais ne s'inquiète pas.
Pas plus que ce promeneur : « Depuis que le terril existe, il sert de terrain de chasse le dimanche. Et je n'ai jamais vu personne malade. » À Courrières, Brigitte Pichot se pose des questions. « Il faut prévoir le nettoyage de la pollution après le départ des industries. S'il y a de la radioactivité, on aimerait savoir. » C'est aussi le souhait de Jacky Bonnemains, président de Robin des Bois, qui demande des analyses radiologiques en complément des relevés chimiques effectués.
Jean-François Caron, président du conseil d'administration de l'établissement public foncier (EPF) du Nord - Pas de Calais, ne veut pas crier au loup. « Ce n'est pas une pollution au sens propre du terme, mais un effet naturel de concentration. Ça n'a rien à voir avec la sidérurgie. Mais par précaution, il faut contrôler les eaux et le gibier. »
L'EPF, propriétaire de plusieurs des sites concernés, en restreint l'accès. « Nous sommes plus préoccupés par la stabilité que par la radioactivité, explique son directeur. Nous partons du principe que les terrils sont d'anciens sites industriels dont on ne connaît pas forcément tous les risques. L'accès est interdit, sauf pour des visites ou des événements sportifs. Mais ces mesures sont difficiles à faire respecter. » L'ASN devrait appliquer le principe de précaution et procéder à un diagnostic radiologique. Une mesure indispensable pour Jacky Bonnemains, qui dénonce la mauvaise volonté des opérateurs des centrales thermiques, dont EDF.
« Toute source d'énergie laisse des déchets en héritage. Mais ces stocks sont rapidement oubliés par la mémoire collective. »
RUBEN MULLER
