Certains ont cru voir dans le référendum turc de dimanche dernier un acte de rapprochement de la Turquie vers l’Europe, lui autorisant de réclamer une accélération du processus d’adhésion. Cette vision des choses procède d’un aveuglement dangereux, et à tout le moins d'une vision à courte vue.
Certes, la réforme de la constitution turque réduit bien le poids de l’armée dans les affaires publiques, ce qui est une bonne nouvelle pour ceux appelant de leurs vœux l'établissement d'un véritable état de droit. Mais c'est oublier que l'armée a été l'un des remparts contre une remise en cause de la laïcité par les partis islamistes au pouvoir. C'est aussi oublier que cette réforme conduit à réduire l'influence d'un autre de ces remparts, le pouvoir judiciaire.
En réalité, si l'on tient compte des véritables conséquences de la réforme constitutionnelle, des changements profonds dans la diplomatie turque, notamment de son rapprochement avec Téhéran, et des transformations observées dans la vie quotidienne, la Turquie d'Erdogan n’a cessé de s’éloigner de l’Union européenne.
A minima, nous n’avons pas le droit de prendre des vessies pour des lanternes. Nous sommes responsables, vis-à-vis de nos concitoyens, d'une orientation aussi lourde de conséquences que celle qui consiste à accepter l’élargissement de l'Union européenne en direction de pays ouvertement favorables à des règles qui méconnaissent l’égalité des femmes, et dont les responsables politiques souhaitent faire primer la loi religieuse sur la loi tout court.